Ushuaia et la Terre de feu

Aller à Ushuaia ou pas ?

Si, avant le départ, Ushuaia ne faisait pas partie des incontournables de notre voyage, l'envie d'y aller est apparue à mesure que l'on descendait vers le sud de l'Argentine.
Il faut dire que cette ville n'a pas la meilleure des réputations chez les voyageurs (guides, blogs, personnes rencontrées...). Elle est souvent décrite comme sans intérêt et au coût de la vie très élevé. Si ce n'est pour dire "nous sommes allés au bout du monde", il semblait donc y avoir peu d'intérêt à aller y faire un tour.
Cependant, durant ce voyage, on a déjà eu de nombreuses occasions de se rendre compte que l'avis des uns est parfois différent du notre et, surtout, qu'on aime bien se faire notre propre idée. Quant au fait d'aller voir le "bout du monde", ce n'était pas un objectif en soi, mais l'idée nous plaisait quand même bien !

La discussion de Thibaut avec Checho, rencontré au camping à El Chaltén et originaire d'Ushuaia a achevé de nous convaincre : il nous a confirmé qu'il y avait plein de belles randos à faire dans le coin et que la nature était superbe. Nous voilà décidés, allons voir ça de plus près !

Le trajet jusqu'à Ushuaia

Restait quand même un petit détail de taille : le budget !
On s'est rendus compte que les billets d'avion n'étaient pas si cher depuis El Calafate (comparé à ceux entre Bariloche et El Calafate, du moins). Le plan était donc de redescendre d'El Chaltén en stop jusqu'à El Calafate puis de prendre un avion de là-bas pour Ushuaia (qu'on avait biensûr pas encore réservé... entre le wifi aléatoire du camping et le site d'Aerolineas qui n'aime pas trop nos cartes bleues). Le niveau d'organisation était donc assez peu avancé mais c'est motivés comme jamais qu'on s'est mis à la sortie d'El Chaltén, par une météo classique (= tempête de vent), et en compagnie de nombreux autres auto-stoppeurs qui patientaient déjà le long de la route. La concurrence s'annonçait rude ! Et finalement assez peu de voitures passaient.
Heureusement, on avait toujours le plan B de prendre le bus si jamais on voyait que le stop ne portait pas ses fruits...

Après 30 min d'attente au soleil et au vent, pas une voiture qui s'est arrêtée prendre un des auto-stoppeurs. Thibaut aperçoit Checho, rencontré quelques jours auparavant, qui se rend au centre des visiteurs avec ses deux enfants. On le salue puis celui-ci nous annonce qu'il rejoint aujourd'hui El Calafate et qu'il peut donc nous emmener à bord de son pick-up aménagé. Quelle chance ! Un petit détour par la librairie et la boulangerie et nous voilà partis, en compagnie de ses deux enfants, Matéo et Juan-Pablo (Juan Pi pour les intimes !).

Au fil de la discussion, on comprend qu'ils ont finalement changé leur plan initial qui devait les conduire sur la côte Atlantique dans le Parc Leone et qu'ils rentrent un peu plus tôt en Terre de feu, pour la rentrée des enfants. L'occasion est trop belle pour la laisser passer, Thibaut lui indique que nous aussi on descend à Ushuaia... mais on ne sait pas encore trop comment. N'y aurait-il pas une petite place pour nous dans le pick-up ? Checho accepte tout de suite et nous propose donc qu'on se joigne à la petite famille jusqu'à Ushuaia. On n'en revient pas de la chance qu'on a, et les prochains jours s'annoncent vraiment sympas en leur compagnie !





Nous voilà donc partis pour 4 jours de route, sur un rythme bien "espagnol" (vive les grasses mat' !) sur des kilomètres de lignes droites au milieu de la steppe patagonienne, à croiser quelques guanacos, nandous, brebis et pichiy (sorte de tatou).
Première escale à Rio Gallegos chez une mamie adorable, où on campera dans le jardin après une soirée crêpe bien sympathique.
Durant ce trajet, on aura bien compris la pénibilité du passage de frontière entre l'Argentine et le Chili. Alors qu'il n'y a pas d'autre itinéraire pour entrer en Terre de feu par voie terrestre, c'est incroyable la quantité de paperasse à fournir pour passer avec un véhicule. Il faut vraiment s'armer de patience.
On poursuit notre parcours par le ferry qui nous fait traverser le détroit de Magellan, l'occasion pour nous de découvrir déjà toutes sortes d'oiseaux qui nous sont inconnus et de voir nos premiers tolinas (mini dauphins). En 20min de traversée, ça commence fort !
On passe ensuite à nouveau la frontière, au coucher du soleil, avec une lumière magnifique puis on fait une pause pizza bien méritée après tous ces kilomètres, à Rio Grande. Checho veut encore un peu poursuivre la route, jusqu'au Tolhuin, où vivent Matéo et JuanPi avec leur maman. On arrivera donc dans cette ville à 3h du matin, par un froid glacial. On dépose juste les enfants avant de rejoindre une aire de parking au bord du lac pour passer la nuit. Checho nous propose gentiment de dormir dans le pickup vue l'heure avancée et le froid glacial à l'extérieur. On ne se fait pas trop prier...
Enfin, le lendemain, on passe déposer les affaires des enfants, leur dire au revoir et on prend la route d'Ushuaia, où on arrive enfin, vers 15h.
Sacré périple pour rejoindre le "bout du monde" ! En effet, on a l'impression d'avoir traversé un continent entier !
En tous cas, le trajet aura vraiment été agréable, en aussi bonne compagnie. Quoiqu'un peu long... (on avait oublié ce que c'était que de faire des heures de voiture avec des enfants en bas âge !).









La fin de la journée est consacrée à trouver un logement pour ces quelques jours dans la région, puis à aller boire une dernière bière avec Checho, que nous remercions comme il se doit.

Autour d'Ushuaia

Après une petite journée "off", à Ushuaia, pour se remettre du trajet et faire quelques appels Skype, on reprend notre découverte de la région. Notre première impression sur la ville est vraiment bonne. On ne la trouve pas orientée à 100% vers le tourisme (le contraste avec El Calafate et El Chatén doit nous aider un peu...) et le cadre est vraiment beau, avec les montagnes enneigées en toile de fond et la vue sur le canal de Beagle et les îles chiliennes. Franchement, ça nous plait bien.
Le resto d'empanadas à deux pas de l'appart' y est sans doute aussi pour quelque chose ;-)
On prend donc déjà deux jours pour explorer les environs avant de se jeter à l'assaut du Parc national.






La laguna Esmeralda

On ne part pas trop tard pour faire une première randonnée, située peu avant la ville d'Ushuaia. On prend un premier bus pour sortir de la ville et on se poste juste après le panneau d'entrée pour faire du stop. On attend même pas 2min avant qu'un couple de brésiliens nous prenne et nous dépose au début de la randonnée, qu'ils vont aussi faire aujourd'hui.
Le parcours débute dans la forêt avant de déboucher sur une immense prairie parcourue par des rivières. Enfin, sans doute une rivière à la base, mais les castors s'en sont donnés à coeur joie et le cours d'eau est maintenant dévié dans tous les sens et on marche sur un terrain boueux/spongieux. L'occasion pour nous de voir les premiers barrages de ces animaux devenus un fléau pour la région, mais aussi nos premières tourbières (piégeux quand on marche dedans !).
Finalement, après 2h30 de marche, nous voilà à la Laguna Esmeralda, qui est en effet bleue/verte, plutôt sympa, mais pas extraordinaire non plus. Petit pique-nique et on prend déjà la route du retour, toujours en stop.



Le Glaciar Martial

Pour cette deuxième journée, on part directement à pied de l'appart. On va prendre un peu de hauteur jusqu'au Glaciar Martial situé sur les hauteurs de la ville, dans une vallée. 8 kms et +700m de dénivelé mais pour récompense une jolie vue sur le canal de Beagle, même si on est quand même un peu trop en recul pour pouvoir en profiter pleinement. Pas d'intérêt particulier pour le glacier par contre : il ne reste pas grand chose, on dirait plutôt un gros névé...



On rentre assez tôt finalement, on en profite donc pour faire un tour du côté du port pour essayer de trouver un voilier qui traverse en face, sur l'Isla Navarino, à Puerto Williams, au Chili, et qui accepterait de nous emmener. Malheureusement, les difficultés administratives du moment, associées à la fin de la saison haute nous laissent peu d'espoir. Mais on passe tout de même un bon moment à discuter avec un skipper français qui part en croisière plusieurs semaines par an en Antarctique... Passionnant !

Parque Nacional Tierra del Fuego

Le Cerro Guanaco

Cette fois ça y est, après ces petites mises en jambe il est temps de partir découvrir le Parque Nacional Tierra del Fuego ! On a repéré deux randos à réaliser, on embarque donc la tente pour passer une nuit à l'intérieur du Parc.
Aujourd'hui, on s'attaque au sommet de cet espace naturel, le Cerro Guanaco, même si la météo est franchement mitigée quand on regarde par la vitre de la voiture qui nous a pris en stop...
Le temps d'aller s'enregistrer au centre des visiteurs et d'accéder au début du sentier, on débute la rando vers 11h. On est contents de quitter les nombreux bus touristiques qui restent au bord du lac et sur les sentiers courts pour prendre la direction de la forêt et débuter par une bonne montée bien raide. Après 1h30, on atteint le premier mirador, avec une jolie vue sur le Lago Roca, turquoise... mais aussi sur le sommet du Cerro Guanaco qui se découvre un peu sous les épais nuages. On reste donc confiants sur la vue à l'arrivée, malgré les petites averses de grêle qu'on subit sur la montée.

On poursuit dans la forêt, c'est beaucoup moins raide mais surtout beaucoup plus boueux, on ne va pas forcément plus vite. Enfin, on rejoint une grande plaine, au sol gorgé d'eau et offrant déjà une vue sympa sur le canal de Beagle. Le sommet est toujours à peu près dégagé, on ne perd pas de temps pour se lancer dans la dernière partie, extrêmement raide, dans un pierrier.
Heureusement, nous sommes récompensés par nos efforts au sommet : une vue superbe sur le canal de Beagle, les montagnes et lacs du parc national, et sur la cordillère de Darwin et les îles chiliennes au loin. Une des plus belles vues qu'on ait eu jusqu'à présent.
On en profite pour pique-niquer rapidement au sommet, il ne fait quand même pas hyper chaud !
En tous cas on a vraiment de la chance, les nuages ne sont pas loin au dessus de nos têtes.








On termine la randonnée en rejoignant l'un des campings situés au milieu du parc et on profite de la belle lumière dorée de la fin de journée. Le Cerro Guanaco est bien caché dans les nuages à présent et lorsque ceux-ci disparaitront, on apercevra une jolie couche de neige sur ses hauteurs.

Pas de neige pour nous au camping, mais un froid glacial qui s'installera une fois le soleil couché. Sac de couchages fermés au maximum, bonnet, collant, chaussettes et polaire pour moi... la nuit va être fraîche !
Et, en effet, au lever du jour, c'est au milieu d'une couche de givre que l'on prend le petit déjeuner... On va sans doute faire une petite pause d'un point de vue camping pour les semaines qui arrivent !




Le sentier côtier

Après un bon café bien chaud et une fois la tente séchée (elle aussi avait gelé...), on part découvrir les mini-sentiers environnants avant que les hordes de bus ne débarquent. (Impressionnant la fréquentation touristique de ce parc !)
On profite donc d'une jolie vue sur la Bahia Lapataia et on se balade au milieu des forêts aux arbres caractéristiques de la région.
Enfin, on rejoint le début du sentier de randonnée, qui longe un bras de mer et nous dirige vers la sortie.
Si la première partie, un peu en recul, est plutôt quelconque, on est bien plus emballés quand le sentier débouche sur la côte. Les petites criques aux eaux claires s'enchainent les unes après les autres, toujours avec une vue superbes sur les montagnes enneigées au loin.
On aperçoit même des tolinas lors de notre pause pique-nique !
Vraiment une jolie randonnée et en plus on est à contre sens de la plupart des randonneurs qui se dirigent vers le centre du Parc.

Après 3h de marche, nous voilà arrivés à la fin de la rando mais un peu au milieu de nulle part... Reste à faire du stop le long de la route et à attendre qu'une (rare) voiture veuille bien nous prendre et nous ramène à Ushuaia, ce qui arrivera après 40min d'attente, très raisonnable.






En conclusion, on a vraiment été enchantés par nos deux jours passés dans le parc national de la Terre de feu. Malgré la foule, les sentiers de randonnées sont bien plus calmes et les paysages époustouflants. Un endroit à ne pas louper !

Avant d'aller acheter nos empanadas préférées, on fait un détour par le port pour voir si d'autres options pour traverser à Puerto Williams s'offrent à nous. Malheureusement, toujours pas de solution en vue. Notre maigre espoir avec un finlandais est tombé à l'eau et il n'y a pas d'autres voiliers qui traversent dans les prochains jours.
Ajoutons à ça que le trek que nous avions repéré sur l'Isla Navarino nous emballe un peu moins après la nuit glaciale que nous avons passée sous la tente... La décision est prise : notre descente vers le sud s'arrête à Ushuaia !

Cependant, avant de prendre la direction du nord et du Chili, on s'offre quand même une dernière excursion dans la région : une croisière sur le canal de Beagle pour aller voir les manchots de Magellan.

Croisière sur le canal de Beagle

Après comparaison des agences qui proposent cette sortie, notre choix s'arrête sur celle qui dispose d'un voilier et accepte 8 personnes maximum à bord. Au programme, de la navigation à la voile (mais pas que) et surtout on évite d'être avec 200 personnes sur un bateau. Par contre, on ne pourra pas descendre sur l'île pour approcher les manchots, mais on est déjà très contents de les voir de si près.

Au départ, la météo n'est pas franchement de la partie. Ciel gris, un peu de vent, et même des averses. Heureusement, on est bien équipés et en plus on est accueillis avec une boisson chaude.
Et puis, le moral des troupes revient vite au beau fixe quand on quitte le port et qu'on aperçoit rapidement toutes sortes d'animaux qu'on a pour la plupart jamais croisés : des dauphins, des cormorans, des albatros, des petrelles, des lions de mer... et finalement les manchots, à proximité de leurs nids et sur la plage !
Il ne manquait que la baleine (mais on ne peut pas avoir de la chance à tous les coups). 

La navigation est vraiment sympa et on apprécie de voir autant d'animaux dans leur cadre naturel. Une jolie manière de terminer notre séjour dans la région !














Commentaires

  1. Et me voilà partie un peu avec vous avec ce périple! De belles rencontres et toujours de superbes couleurs, ça donne vraiment envie....
    Gros bisous

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    1. oui on ne regrette pas d'être allés jusque là ! ça vaut le "détour" :-)

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  2. Bel endroit pour toujours de nouvelles découvertes et nous regaler de vos recits ,malgré une nuit glaciale !!!
    Bisous a tous les deux Danielle

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    1. On va désormais attendre d'être un peu plus au nord pour camper, mais l'ambiance au petit déjeuner était tout de même magique... En tous cas, superbe région !

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  3. Super halte ! Mais c'est malin de parler d'empanadas pile quand j'ai faim...
    Bises nono

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    1. ah celles-là elles sont dans notre top 3 en plus ;-)

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  4. Pour le coup , si ce n'est l'ambiance glaciale, votre récit et vos photos donnent bien envie d'aller au bout de monde.
    Majestueux !
    Bises
    Sophie P.

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    1. à ajouter en étape lors de votre prochain voyage en Argentine ? ;-) Bises

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